Article proposé par Exponaute

Triennale de Bruges 2018 : de créatures en pavillons

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Publié le , mis à jour le
Sur exponaute, nous vous avions annoncé Liquid City, la Triennale de Bruges 2018. Nous pouvons à présent allonger notre sélection d’œuvres à voir et à pratiquer, puisque l’événement a débuté en mai et dure jusqu’à septembre 2018. Voici quatre installations hautes en mesure, fortes en couleur, et généreuses pour leurs visiteurs !

Selgascano pavilion © Iwan Baan

Reconnue patrimoine mondial de l’UNESCO, Bruges informe les visiteurs de sa Triennale que ses fondations peuvent porter le visage d’une ville future…  Pour ce faire, elle compte sur la « modernité liquide » telle que Zygmunt Bauman la théorisa. Pour sa Triennale, Bruges étend ce concept à son échelle et décline les ponts, les passerelles, les jetées qui touchent parfois le ciel.

Sur le patrimoine existant, après les primitifs flamands, Bruges a invité les artistes et architectes à donner des formes contemporaines et futures à l’accueil, la co-création, la connexion, l’écologie… Ces formes sont publiques, praticables, propices à la rencontre des gens et des éléments. Ce sont des « balises rassurantes face à un avenir imprévisible [qui] offrent un port d’attache » dit Michel Dewilde, commissaire de la Triennale.

Mais ce dernier avoue aussi que construire une exposition à l’extérieur, en climat belge, in situ et sur l’eau… relève de l’impossible. Pourtant cet été à Bruges, en suivant les canaux on peut profiter de grandes installations aux allures de mirages possibles ! Pleins feux sur quatre d’entre elles, œuvres flottantes et jaillissantes.

Selgascano pavilion

À Bruges, la Coupure permettait autrefois aux bateaux arrivant de la mer du Nord de rejoindre le canal qui mène à Gand. Elle coupait le réseau pour raccourcir la circulation. Cette ligne bordée de maisons et d’usines est aujourd’hui l’artère d’un quartier calme. On s’y rend peu, les écluses sont le plus souvent fermées ; qu’il est agréable, alors, de s’excentrer un peu du centre-ville pour flâner !

On y découvre un grand tableau orange. Les portes et les fenêtres peintes d’une maison se réverbèrent sur un pavillon-vortex. C’est l’installation du bureau d’architecture espagnol selgascano. Ses parois transparentes en plastique aspirent et rendent toute la lumière à l’eau. L’œuvre phosphore d’un effet étrange et donne une impression de bulle ancrée à sa rive, comme à Paris la Cité de la mode et du design s’accroche au quai d’Austerlitz.

En l’empruntant, sous la serre rose-orange comme en vase clos, on déambule avant de rejoindre une terrasse jaune. On peut s’asseoir, rester, tremper les pieds et même plonger. Pendant ce temps, les rayons du soleil percent le plastique et le sol devient vert…

Lanchals, John Powers © Iwan Baan

Lanchals

Rejoignant le cœur de la ville, ses terrasses, ses jardins, s’arrêtant à un pont, on distingue une courbe cyclopéenne. Elle atteint les toits, elle est liée comme un monstre que l’on tenterait d’enchaîner. C’est l’œuvre de l’artiste new-yorkais John Powers, qui souhaitait offrir aux brugeois une structure en bord de canal.

Il n’est venu à la ville qu’avec le dessin d’une courbe ! Cette esquisse sur papier a donné naissance à un titan sur la petite place de Minneboplein. On dirait un serpent, un tentacule, à moins qu’il ne s’agisse d’un oiseau que l’on croise dans la ville, et dessiné pour elle… Oui, ce géant d’acier est le cou d’un cygne.

Il se cabre fièrement. Et si l’on se place en dessous on peut distinguer la multitude de modules d’acier patinés, identiques, qui s’appuient les uns aux autres pour atteindre une hauteur de quinze mètres.

Pour cette œuvre, John Powers s’est inspiré de la légende liée à Peter Lanchals, un conseiller de l’archiduc Maximilien d’Autriche. Le haut fonctionnaire fut décapité au XVe siècle, lors d’une révolte populaire visant à préserver les privilèges de la ville. En représailles, l’archiduc réunit une armée pour mettre la ville à sac. Bruges récupéra plusieurs privilèges, mais fut contrainte d’entretenir éternellement 52 cygnes sur les canaux…

Skyscraper (the Bruges Whale), Studio KCA © VisitBruges | Jan D’hondt

Skyscraper (the Bruges Whale)

Lors de notre visite à Bruges, sous la place Jan Van Eyck cinq plongeurs œuvraient pour faire bondir une sculpture du canal… C’est l’immense baleine conçue par le duo d’architectes américains Studio KCA.

Elle surgit de l’eau et atteint quatorze mètres de haut. Ancrée à une plateforme métallique, elle est faite de millions de plastiques qui dérivaient dans les mers et les océans de toute la terre… Son poids est composé de tonnes de déchets collectés sur les plages d’Hawaï. Ils surgissent comme une montagne océanique, un animal pollué, comme l’urgence d’une prise de conscience.

The Floating Island, OBBA © VisitBruges | Jan D’hondt

The Floating Island

Sur les canaux près du Snaggaardbrug, des cordages blancs sont tendus comme les filets d’un trimaran. Des boules suspendues se balancent au vent. Quand on circule sur ce pont de bateau, on sent une impression de plénitude, de calme maritime et aérien qui rappelle la promenade sous les résilles du Mucem à Marseille. C’est que les auteurs, OBBA – Office for Beyond Boundaries Architectures – ont souhaité créer un espace sans le fermer afin que tout le monde puisse participer et profiter du lieu.

Voilà une œuvre généreuse, qui propose une expérience au lieu. Une plateforme flottante et publique de plus de 100 mètres carrés, qui offre une promenade entre des fils parallèles et croisés, entre des rideaux courbés mais aussi des sièges et des hamacs inclinés au-dessus de l’eau. C’est une transition fluide offerte aux brugeois.

Et c’est la beauté de cette Triennale. Cet été, elle offre aux habitants et visiteurs des lieux pensés pour sublimer la pause dans la ville liquide. Des lieux qui imaginent l’accueil en adaptant leurs formes aux modes de vie et de circulation à venir.

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