Article proposé par Exponaute

“Toguna” contre la falaise du Palais de Tokyo

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Publié le , mis à jour le
C’est avec une grande carte à la main que l’on évolue dans le Toguna du Palais de Tokyo. L’institution a invité artistes et artisans à imaginer des installations en s’inspirant des constructions qui longent la falaise de Bandiagara au Mali. Le toguna n’est pas assez haut pour s’y tenir debout, ceux qui le pénètrent sont contraints de s’asseoir et de se rapprocher afin de converser. C’est donc l’architecture qui force la réunion et initie la transmission. Au Palais de Tokyo, la grande salle prend une forme composite où les matières re-créent les grottes et les gradins…

Toguna © Fabrice Gousset

Des duos pour des matières

Il s’agit d’une œuvre collective conçue par des duos d’artistes et d’artisans d’art. C’est tout l’intérêt de cet événement : le détournement des savoir-faire et des matières.

Dès l’entrée, une masse noire animale se distingue et attire le visiteur. On voudrait toucher les 10 000 plumes du mur de l’Illusion  imaginé par l’artiste Jean-Marc Ferrari et le plumassier Julien Vermeulen, qui font d’une paroi une aile, ou un duvet obscur et irisé.

L’artisanat culmine en haut de la mezzanine du Toguna : c’est le garde-corps de l’escalier bardé de décors, avec des mains qui décrivent des barres dans le geste du travail et atteignent le motif plastique jusqu’aux ombres projetées sur le mur en face.

Le plasticien Thomas Teurlai a travaillé avec MTX Broderie architecturale pour créer une« broderie mécanique ». Elle est composée de rectangles de tissus taillés dans une étoffe à l’aspect changeant et liés par l’écrou et la tige filetée sur des câbles tendus. Ils forment ensemble un motif monumental et quand on les photographie avec le flash, leur surface grise se métamorphose sur le cliché en rideau multicolore et lumineux. Il bat comme un cœur de grotte pourrait pulser, grâce à des moteurs installés de l’autre côté du mur. On l’entend d’ailleurs, de la grotte…

Vue du Toguna, Neve par Francois-Xavier Richard © Palais de Tokyo en partenariat avec la Fondation Bettencourt Schueller

Exploration sur re-créations

…elle attire dès l’entrée le visiteur curieux. Conçue par l’artiste Anne-Laure Sacriste et la laqueuse Martine Rey, elle se présente comme une immersion nocturne. Ses murs à l’intérieur sont recouverts de laque, qui symbolise le passage des ténèbres à la lumière. L’artiste souhaitait évoquer aussi par quelques formes dans ce ventre parsemées la carapace d’un scarabée. La grotte est un espace secret où l’on se cache, se camoufle, où la lumière s’infiltre par la verrière et change sur la laque du matin jusqu’au soir.

La visite dans le Toguna a des allures d’exploration car les matières originales, décoratives et architecturales, interpellent l’œil et compliquent la progression classique. Le cheminement permet de renouveler le regard sur des formes que l’on croyait comprendre – une falaise, un rocher… – mais celles-là sont recréés. Ce sont des escaliers minéraux et géométriques ou de blancs gradins couverts de papier peint.

Obsideo a été conçu par Dimitry Hlinka et Pierre-Henri Beyssac. Le titre signifie en latin « investir » un lieu. C’est ce qui se passe quand on percute ces marches réalisées par un designer et un marqueteur. Le liège sombre est agencé en cubes que creusent régulièrement et sans s’interrompre des lignes de pierre en circuit. Du haut de l’Obsideo que l’on grimpe au rythme des incrustations, Toguna s’offre à nous, en surplomb.

On fait aussi face à Névé de François-Xavier Richard, dominotier. Il a encollé des carrés de papier sur les murs et les plafonds, au-dessus des gradins recouverts d’une carapace de « carton-pierre » – un matériau rare aujourd’hui, entre le stuc et le papier mâché. Cette matière blanche donne l’impression de voir un habitat troglodyte gaufré de reliefs, de motifs baroques et éclectiques imprimés sur une matière brute.

Dans le Toguna du Palais de Tokyo, on découvre des re-créations d’architectures, de montagnes et d’éléments. On circule, on se heurte, on grimpe et l’on touche les murs… des quelques installations cohérentes avec le thème et le paysage d’inspiration.

Toguna © Fabrice Gousset

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