Article proposé par Exponaute
Dispersée peu de temps après la mort de l’artiste par son propre fils Michel Monet, depuis tombée dans l’oubli, que reste-t-il seulement de la collection d’art constituée par Claude Monet au cours de sa vie ? Du propre aveu des commissaires de cette nouvelle exposition temporaire organisée par le musée Marmottan-Monet, la mise au point de l’accrochage s’est déroulée comme une véritable enquête policière. Collecter des témoignages, rassembler des sources, ouvrir des cartons d’archives…
Car s’il a bien existé un inventaire après décès de la collection rassemblée par l’artiste aux nymphéas, ce document unique à l’époque conservé aux Andelys fut perdu suite aux bombardements de la Seconde Guerre mondiale. Mais le résultat de ces longues, parfois fastidieuses, recherches est véritablement des plus admirables : pas moins d’une centaine d’œuvres a été rassemblée pour ce cheminement temporaire, présenté par le musée de l’ouest parisien jusqu’au 14 janvier 2018.
C’est d’abord une galerie réalisée par les amis de Claude Monet qui nous invite à pénétrer plus avant dans cette exposition temporaire. Deux portraits émouvants de Monet et de son épouse, présentés en pendants, ont été réalisés par un intime de la famille : Auguste Renoir. On reconnaît d’emblée la patte de l’impressionniste dans ce portrait de Monet représenté en veste sombre et chapeau vissé sur la tête, la pipe fumante entre les dents et un journal ouvert entre les mains.
Monet semble avoir été immortalisé dans un moment de calme réflexion par son ami, les yeux mi-clos et les traits apaisés. Et l’amitié justement, occupe une place centrale dans la constitution de cette exceptionnelle collection. Gustave Caillebotte (1848–1894), d’abord. L’artiste jardinier fût très tôt particulièrement lié à cet autre peintre qui allait devenir jardinier lors de l’achat de la propriété de Giverny et Monet posséda trois huiles sur toiles de son contemporain.
L’œuvre Chrysanthèmes blancs et jaunes exécutée un an avant la mort de l’artiste est une illustration étonnante de la maestria de Caillebotte pour la représentation des matières et la complexité des plantes. On retrouve Berthe Morisot ensuite, qui a offert à Monet un délicat et touchant pastel intitulé Fillette au panier, aux dominantes douces et lumineuses.
Camille Pissarro enfin, qui offrit à son ami peintre sa toile Paysannes plantant des rames (peinte en 1891) en signe de reconnaissance. Claude Monet en effet, avait avancé la somme de 15 000 francs à la famille Pissarro pour que cette dernière puisse enfin acheter la maison qu’elle louait jusqu’alors du côté d’Eragny. Pissarro n’oublia jamais ce geste de la part de l’impressionniste et lui en fut reconnaissant toute sa vie durant.
Peut-être un peu moins évident (et c’est une des bonnes surprises de l’exposition), on découvre que Monet fut en contact avec Rodin. Les deux créateurs se trouvèrent en effet réunis le temps d’une exposition en 1889 et probablement à la suite de cet événement, l’auguste sculpteur offrit au peintre jardinier trois petites réalisations : un bronze et deux plâtres.
L’exposition continue ensuite d’acquisition en acquisition, d’abord des œuvres de petit format et peu onéreuses, car il y a un début à tout ! Une huile d’Eugène Boudin, des croquis d’un autre Eugène, Delacroix cette fois-ci, ainsi qu’un sublime portait de profil de Richard Wagner, aujourd’hui attribué à Henri Fantin-Latour, bien qu’un doute subsiste. Puis, avec l’aisance financière, arrivent les achats majeurs, à l’instar des plantureuses et douces Baigneuses d’Auguste Renoir, sans oublier plusieurs peintures de l’aixois Paul Cézanne et plus tardivement, une poignée d’aquarelles délicates et dansantes signées Paul Signac.
Le cheminement prend fin magistralement, avec une sélection d’une autre passion de Claude Monet : celle pour les estampes japonaises. Nez fin, l’artiste de Giverny a commencé à s’intéresser à cet art nippon avant que la mode ne déferle sur l’Europe, ce qui explique qu’il a pu acquérir des réalisations signées Katsushika Hokusai ou Utagawa Hiroshige à un coût relativement peu élevé.
Aujourd’hui, encore 247 de ces estampes sont présentes à Giverny, allant de la représentation de carpes koï à d’élégantes courtisanes vêtues de lourds kimonos en passant par des paysages enneigés dont on ne se lasserait pour rien au monde. En somme et vous l’aurez compris, ce nouveau parcours du musée Marmottan-Monet nous a enthousiasmés ! On y va !
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