Article proposé par Exponaute
Comment trouver une définition précise du bijou ? Est-il une sculpture portative ? Une œuvre d’art ? Une pièce d’artisanat ? Un talisman ? Un marqueur social ? Plutôt que de trancher, est-il possible d’avancer l’hypothèse selon laquelle il serait tout cela à la fois ? Voilà, en substance, ce que propose d’explorer le Musée d’art Moderne de la ville de Paris, avec l’intéressante exposition « Medusa : Bijoux et Tabous ».
Ce n’est d’ailleurs pas par hasard si l’institution parisienne a choisi comme titre du parcours une référence à la fameuse gorgone de la mythologie grecque Méduse, qui fascinait par son regard capable de transformer les hommes en pierre et repoussait par son apparence terrifiante. Car c’est bien connu : plus on cherchera à ne pas regarder quelque chose et plus il sera pressant de céder à la tentation. Mais de nos jours, peut-on dire du bijou qu’il est une sorte de talisman, s’interroge le musée dans la quatrième partie de l’exposition ? Analysons ensemble cette question.
Loin d’autres expositions parisiennes qui ont pu mettre en avant une ribambelle de trésors tous plus inestimables les uns que les autres (on pense par exemple à l’exposition Cartier qui s’était tenue en 2014 ou plus récemment à la collection du Qatari Al-Thani au Grand Palais), le parcours mené par le Musée d’art Moderne de Paris s’entend avant tout comme une réflexion sociologique. Que doit-on voir dans cette broche en forme de bouche souriante ? Dans ce collier sinuant au cou de la dame comme un serpent ? Dans ces bagues si imposants qu’elles en éclipsent la finesse de celle (ou celui !) qui la porte ?
Le bijou en vérité, n’est jamais un simple objet ornemental, porté pour sa seule valeur esthétique. Au contraire, il est souvent considéré comme un talisman, une protection, un bouclier ou un porte-bonheur. Si aujourd’hui cette image du bijou peut paraître quelque peu désuète, force est de constater que la parure accompagne de son éclat les étapes importantes d’une vie d’homme ou de femme. On s’offre des alliances lors d’un mariage, on perce les oreilles des petites filles, on achète un diamant solitaire à sa bien-aimée, un homme acquiert sa première montre de valeur…
Dans sa dimension religieuse, les personnes croyantes arboreront un crucifix autour du cou ou une étoile de David, comme revendication de ses convictions ou comme simple besoin de se sentir « protégé » par la représentation symbolique qu’une force supérieure qui l’est tout autant. Le bijou en somme, incarne un rite de passage qui scelle ce changement d’une étape à une autre.
Comment alors aujourd’hui, pouvoir espérer ôter du bijou sa portée superstitieuse et symbolique ? Le bijou se met au service de notre personne, représente notre religion (rosaire), notre statut social (décoration par exemple de la Légion d’Honneur), notre rôle hiérarchique (couronne, sceptre…) Il participe à ancrer dans l’imaginaire publique une image que l’on souhaite donner de soi-même, qu’elle soit conforme ou non à la réalité.
Par la suite, cette image elle-même servira de protection éventuelle contre le reste du monde. Bien évidemment, tout cela relève de l’imaginaire : nous accordons à un bijou l’importance, les pouvoirs, les capacités « magiques » que nous souhaiterions le voir posséder véritablement. Mais n’est-ce pas là partie intégrante de toute la complexité de la parure ?
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