Article proposé par Exponaute
Le ciel paraît chaotique au-dessus des champs fraîchement moissonnés. Cumulonimbus gonflés de fougue prêts à laisser fondre leur chargement de gouttelettes glacées sur un sol avide d’un peu de fraîcheur. C’est là un orage d’été dans le Vexin français, l’heure est à l’atmosphère chargée d’électricité et à la moiteur dans les nuques des travailleurs de la Terre. Mais ces laboureurs patients du sol nourricier, il ne faut nullement les chercher dans les photographies d’Olivier Verley, ce serait là une quête vaine. Tout au plus trouverez-vous de l’homme quelques unes de ces laides constructions modernes qui balafrent la nature de leurs câbles en cuivre, promesses de haut-débit et d’images en Haute Définition.
Non, ce qui attire l’œil de l’artiste Olivier Verley, ce sont les paysages plats, apaisés d’apparence, porteurs de douceur, ceux de cette région d’adoption qu’est pour lui le Vexin français. Il connaît ses routes, il a foulé ses sentes et aujourd’hui, au sein de l’exposition « Dans le sens du paysage », il nous en dévoile les secrets insoupçonnés. Seulement le Vexin ? Erreur. Le Gers, les rives de l’Oise, l’Italie et l’Espagne ont également droit de cité dans ce rêve photographique où il n’est question que de sensibilité et de lumière.
Alors Olivier Verley a erré, longtemps. Installé à Auvers sur Oise la mythique, dernière vision de Vincent van Gogh, il a traversé les vallons, les plaines, les bois, les champs cultivés, appareil photo argentique en bandoulière. Nous avons bien dit argentique. Pas de numérique pour un photographe qui aime, comme il le rappelle souvent, suivre tout le développement des opérations ; du choix de la pellicule en noir et blanc aux bains dans lesquels il va lui-même révéler les clichés. Aucune couleur pour honorer les paysages, l’absence de teintes chamarrées pour parler des merveilles de la nature ? Voilà un paradoxe qui n’en est, en réalité, pas un selon Verley.
L’argentique exige patience, précision, minutie. Le noir et le blanc épousent les formes, nimbent les orages, enveloppent les chemins des Hommes et les coulées des animaux. Son fort contraste sculpte une image rêvée et qui nous appelle, à notre tour, à pénétrer dans le processus du rêve. Il convient alors d’attendre le moment propice. Sortir aux premières lueurs de l’aube réconfortante, vagabonder aux heures entre chien et loup de sorte à obtenir une lumière rasante et douce. Et si les pérégrinations d’Olivier Verley l’amenèrent en promenade photographique au beau milieu de l’après-midi, il n’y aura aucun déclenchement hormis en présence de cieux menaçants, de nuages épais qui créent sur le sol des ombres soit rampantes, soit dansantes, mais qui ne nous laissent pas indifférents.
La couleur serait-elle une distraction ? Pour Olivier Verley en tout cas, elle ne correspond pas à ses attentes épurées et brutes à la fois. Ce qui l’intéresse, c’est la rondeur de l’ombre projetée par une meule de foin sur un champ s’étirant à perte de vue. C’est le contraste créé par une branche d’arbre zébrant un horizon uni et calme. C’est le surgissement inattendu d’un calvaire rongé par le lichen et les pluies tombées pendant des siècles au croisement de quatre routes. C’est le sillon blanc tracé par un sentier champêtre au creux d’une étendue plantée de colza, dont les fleurs sont d’une blancheur immaculée à travers la pellicule en noir et blanc du boîtier argentique de l’artiste. Des boîtiers d’ailleurs, souvent anciens, parfois sans cellule, ce qui impose au photographe de mesurer lui-même la lumière afin d’assurer une exposition correcte au film. Voilà un petit bijou d’exposition, qu’il faut visiter absolument.
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