Article proposé par Exponaute
Il n’y a pas qu’au cours des siècles lointains que le vêtement féminin était porteur de distinction sociale, loin s’en faut ! Le long XIXe siècle ne fait pas exception à la règle, et c’est précisément ce que cherche à illustrer la nouvelle exposition temporaire du Château de Champs-sur-Marne. La gent féminine, tout particulièrement, se doit d’occuper un rôle tout entier tourné vers la notion d’apparence et c’est ainsi qu’au rythme des saisons, réceptions et autres événements mondains, leurs toilettes complexes évoluent, se diversifient, mais surtout reflètent leur aisance financière et le milieu dans lequel elles évoluent. La bourgeoisie, désormais classe dominante, n’hésite pas à faire appel aux plus grands couturiers afin de dessiner pour elle costumes trois pièces, robes à faux-culs et accessoires délicats (chapeaux, gants, bijoux…)
L’exposition du domaine de l’est parisien cherche à démontrer également les nombreux bouleversements survenus dans la conception de la silhouette féminine. Si à la fin du XIXe siècle, le port du corset (victorien ou edwardien) demeure encore la norme, contraignant les déplacements et la gestuelle des femmes, celui-ci est appelé à peu à peu perdre du terrain au fil des décennies. De corset enveloppant, il devient peu à peu serre-taille, puis simple gaine, afin de disparaître vers les années 1930. Les robes de ces dames, bien sûr, s’adaptent à cette forme nouvelle et les robes ne cherchent plus à marquer la taille et relever la poitrine comme elles ont pu le faire par le passé. Le contraste entre certaines robes de 1890 et 1910 paraît particulièrement flagrant, passant d’un ensemble complexe composé de plusieurs pièces à des blouses vaporeuses, amples et laissant tailles et bassins totalement libres.
Mais alors, qu’est-ce qui a bien pu apporter ces changements dans la mode, et plus particulièrement dans la mode féminine ? On le découvre assez vite au détour des couloirs feutrés de Champs-sur-Marne, les événements historiques et économiques sont toujours inextricablement liés à l’histoire du vêtement. D’abord, survient la Révolution Industrielle, qui simplifie nombre de mœurs, libère hommes et femmes de contraintes et apporte une plus grande importance aux plaisirs, à la flânerie et au temps libre. Certains sports se développent, à l’instar du vélo ou du golf, exigeant de façon à les pratiquer des vêtements adaptés, plus souples, moins serrés et donc contraignants.
Au tout début du XXe siècle, il n’est pas rare d’encore croiser des femmes serrées dans leurs corsets et arborant des toilettes complexes, magnifiquement ornées, avant de laisser la place, passé le Premier Conflit Mondial, à des atours bien plus fonctionnels, qui abandonnent laçages, baleines et poitrines comprimées. Puis surviennent les années 1920 et 1930, on peut admirer l’essor fulgurant de la mode dite « Charleston » : les vêtements ne dessinent plus la silhouette, les vestes de ces messieurs ne sont plus aussi cintrées que par le passé, les franges, breloques, colliers longs et froufrous ornent robes et jupes, tandis que les corps sont libres de se mouvoir et de danser au cours de soirées « cocktails » qui prennent le relais des salons aussi mondains qu’étriqués.
Un mot enfin, sur la magnifique scénographie orchestrée par le Château de Champs-sur-Marne. Les vêtements exposés dans le parcours étant tous d’époque, une présentation dans la pénombre s’est avérée nécessaire, ces textiles anciens souffrant cruellement d’une trop longue exposition à la lumière du jour. Qu’à cela ne tienne ! le château a choisi de créer une mise en scène feutrée, rayonnante et intelligente, qui plonge le visiteur dans une sorte de réception privée à la lumière des chandeliers et des lampes murales, comme s’il était un invité d’honneur et que ses hôtes l’attendaient à la tombée du jour, parés de leurs plus belles toilettes afin de les recevoir dignement. On avance ainsi à pas de loup dans les différentes salles du parcours, les tissus et parures brillent sous les lumières chaudes des ampoules tandis que Champs-sur-Marne adopte une autre atmosphère, plus secrète, plus intimiste, qui nous enchante.
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