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Rothko, Pollock, De Kooning : le Guggenheim Bilbao donne de l’espace à l’Expressionnisme abstrait

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Jusqu’au 4 juin prochain, le Guggenheim Bilbao accueille une vaste exposition consacrée à un mouvement majeur de l’Histoire de l’art au XXème siècle : l’Expressionnisme abstrait. Rothko, Pollock ou De Kooning, la grande exposition s’attarde en détail sur chacun des piliers du mouvement pour finalement en offrir une vision globale et didactique à grands coups de chefs-d’oeuvre.
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Mark Rothko, Yellow Band, 1956 © 1998 Kate Rothko Prizel and Christopher Rothko/VEGAP, Bilbao, 2016 Photo: © Sheldon Museum of Art

Gigantesque, spectaculaire, magistral. S’il est un mouvement artistique auquel ce genre de qualificatif correspond précisément, l’Expressionnisme abstrait est celui-là. Fondamentalement libéré de toute prérogative, il offre à l’individu l’opportunité infinie de s’exprimer par la peinture sans contrainte formelle : pour la majeure partie des artistes de ce mouvement phare du milieu du siècle dernier, cela se traduit par des œuvres immenses, des œuvres qui se fondent aux exigences de l’imagination, des sensations et du sentiment de leur créateur.

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Gigantesque, spectaculaire, magistral. L’instant précis qui voit apparaître la ville de Bilbao pour la première fois n’échappe pas, lui non plus, à ces superlatifs. Tout cela grâce à son musée, à ce monument autour duquel elle semble graviter, apparu en son centre il y a déjà une vingtaine d’années. Le conditions semblent donc parfaites : les espaces immenses du Guggenheim Bilbao (dont l’une des œuvres permanentes est un vaste labyrinthe signé Richard Serra) parfaitement adaptés à recevoir les plus grands artistes du mouvement en leur offrant la place qu’ils méritent. Une exposition historique, plongée dans l’infini des couleurs des Expressionnistes abstraits.

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Conrad Marca-Relli, Esast wall (LL-10–59), 1959 © Archivio Marca-Relli, Parma Photo: Roberto Ricci

Pollock, Rothko, De Kooning, Still, les grands noms du mouvement se succèdent : l’exposition se veut grand public, didactique et, dans cette optique, n’oublie personne. D’abord présentée à Londres, elle semble pourtant avoir été créée sur mesure, pour le Guggenheim Bilbao : après une brève introduction, chaque artiste se présente à nous dans sa propre salle. Difficile de faire autrement. Car le fondement de cet Expressionnisme, détaché de la représentation de la réalité matérielle, c’est précisément la célébration de l’individualité. Derrière l’expression radicalement libre de la chose poétique se cache plus qu’un style ou qu’une personnalité : l’immensité d’une perception concrétisée, traduite, par les possibilités infinies de la peinture.

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 Clyfford Still, PH-247, 1951

Ainsi découvre-t-on Mark Rothko. D’abord grâce à un tableau figuratif dont le fond presque géométriquement bicolore qui nous intrigue, nous tape dans l’œil tant il envisage l’avenir abstrait de la carrière du peintre. Ensuite à travers des toiles monumentales, dans une mise en scène digne de la chapelle Rothko de Houston (USA), véritable défilé de nuances, de fondus et de comparaisons. L’artiste américain tient évidemment une bonne place dans ce grand rassemblement des abstraits, accompagné de son compatriote Jackson Pollock lui aussi célébré par le musée.

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Robert Motherwell, Wall painting No III, 1953 © Dedalus Foundation, Inc. /VAGA, NY/VEGAP, Bilbao, 2016

Immense parmi les immenses, monument parmi les monuments, le coup de génie de l’exposition est probablement l’installation des œuvres de Clyfford Still, ses toiles gigantesques présentées dans une salle interminable de verticalité et idéale pour contempler son travail. Verticale comme la fine trace de couleurs vives, quasi-fluo, bouleversant intrus pourfendeur d’un maelström sombre ou lueur d’espoir dans un océan de ténèbres, c’est selon. Tout est effectivement dans la perception, notre perception. Tout est dans la capacité du peintre à toucher au vif le cœur d’un inconnu, sa subjectivité parvenant à toucher à l’objectif, l’homme s’acoquine avec l’infini par la liberté de son expression. L’exposition s’achève sur un sympathique air de famille, un bassin au nymphéas de Joan Mitchell, dans la pure continuité de son instigateur, développant sur la base d’un même motif modèle les possibilités infinies de la peinture, plus radicalement mais avec élégance. Avec cette élégance commune à tous les artistes du mouvement, cette élégance dont on ne se lassera jamais.

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