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Au fil de la Seine, quand les peintres représentent la banlieue

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Ils sont tous là ! Corot, Daubigny, Vlaminck, Sisley, Monet, Utrillo, Besnard, Caillebotte, Jongkind, Pissarro… Toute une génération de peintres, dessinateurs, graveurs sur qui les méandres de la Seine comme les paysages bucoliques des abords de Paris exerçaient une fascination hypnotique. Tous, chacun à leur époque, sont venus poser leurs chevalets en bordure des fleuves des alentours de la capitale, représentant au choix un moulin à la fière allure pastorale ou un champ de blé doré par la lumière du soleil couchant. Certains, à l’aube du XXe siècle, tournèrent plutôt leur regard vers l’industrialisation massive de la France et ses ravages sur le paysage. Découverte d’une sublime exposition présentée à l’Atelier Grognard de Rueil-Malmaison.
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Charles-François Daubigny, La Seine à Bezons, 1851 © Musée d’Orsay

Connaissez-vous les charmantes communes de Chatou, Bougival, Étampes, Meudon, Saint-Cloud, Yerres, Issy-les-Moulineaux, Suresnes, Poissy ? Toutes ces petites villes ont en commun de ne se trouver qu’à quelques encablures de la capitale, Paris, et d’être baignées par la Seine (principalement) et la Marne (de temps en temps). Toute ces bourgades sont dès aujourd’hui et jusqu’au 10 avril 2017 mises en lumière, telles qu’elles étaient entre les XIXe et XXe siècles, mais surtout telles qu’elles ont été admirées, détaillées puis représentées par une génération entière d’artistes.

C’est à cette découverte fascinante que nous convie donc l’Atelier Grognard, charmant espace culturel de la ville de Rueil-Malmaison, elle aussi dont les pieds sont léchés par le cours de la Seine et elle aussi à quelques minutes de Paris. Le parcours de l’exposition, aussi bien chronologique que thématique, se propose d’explorer un surprenant panorama des diverses représentations de la banlieue parisienne. Selon les saisons, selon les mouvements, mais aussi et surtout selon les époques.

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Georges Manzana-Pissarro, Effet de neige sur la Seine, 1902 © Musée Pissarro – Pontoise

C’est ainsi que notre découverte débute en 1850. À cette époque, des peintres comme Daubigny, Cézane, Lépine ou Pissarro partent explorer une banlieue encore méconnue, territoire bien plus vastes que les ruelles étriquées et grises des grandes villes où de toutes nouvelles sources d’inspiration s’offraient à eux. La séduction opère immanquablement : sur les toiles des artistes se révèlent des régions naturelles, préservées, campagnardes et idylliques. L’eau, surtout, est omniprésente.

En ce temps, c’est en effet une eau qui n’a pas encore été maîtrisée, régulée, contrôlée, asséchée qui s’offre au regard des artistes. Au détour d’un chemin forestier, aux abords d’un charmant village, en-dessous d’un pont, peintres et dessinateurs observent les reflets de la lumière sur les surfaces calmes de mares, étangs, lacs ou bras de la Seine comme de la Marne. Le cours calme des fleuves offre aux artistes des opportunités picturales uniques, l’eau reflétant parfaitement un ciel changeant ou une atmosphère automnale un brin magique et spectaculaire.

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Maximilien Luce, La Seine à Issy-les-Moulineaux, 1920 © Musée d’Issy-les-Moulineaux

Les petites étendues d’eau stagnante quant à elles, recèlent quelque chose de merveilleux, unique et préservé. Les artistes ont la sensation de pénétrer dans un univers qu’ils ont été les premiers à découvrir et s’empressent de saisir cette ambiance via la peinture à l’huile avant que le charme ne se brise.

Quelques pas plus loin et un bond dans le temps réalisé, nous apercevons les tous premiers changements provoqués par les balbutiements de l’industrialisation. Claude Monet a représenté, toute embrumée de vapeur, la gare d’Argenteuil bien avant celle de Saint Lazare que tout un chacun visualise. Albert Marquet a observé les réjouissances et les distractions de ces plaisanciers qui quittent pour la première fois la ville de Paris dans le but de se dépayser du côté de Chatou ou de Croissy-sur-Seine.

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Gustave Caillebotte, Bateau à l’encre sur la Seine à Argenteuil, 1888 © Collection du Val d’Oise

Caillebotte, amoureux comme il l’était de l’élément aqueux, regarde non sans un certain plaisir se développer la pratique de la voile sur les flots apaisés de la Seine et non sans un œil quelque peu moqueur, Maximilien Luce observe ces vacanciers du dimanche venir prendre le soleil sur les rives de la Seine avant de remonter dans leurs wagons de fer retourner à leur vie citadine, avec le sentiment d’avoir effectué un très long voyage et passé du temps dans une région lointaine et inconnue.

Le dépaysement est total et le plaisir de la visite assuré par toutes les belles œuvres qui ont été réunies à cette occasion par l’Atelier Grognard. Mais il faut le souligner : si nous avons énuméré en début d’article des grands noms de l’art du milieu du XIXe siècle, il n’en demeure pas moins que de très nombreux « petits » maîtres ont également été sortis des réserves des musées sous l’impulsion de l’institution culturelle de Rueil Malmaison.

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Camille Pissarro, La diligence, 1877 © Musée d’Orsay

Après tout, pourquoi mépriser des artistes comme Georges Manzana-Pissarro, Pierre-Emmanuel Damoye ou encore Charles-Jean Forget lorsque leur regard artistique se révèle tout aussi parlant que celui des maîtres régulièrement célébrés par les musées de France ? Courez-donc voir l’exposition « Peindre la banlieue » de l’Atelier Grognard, vous ne serez pas déçus…

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