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Fantin-Latour : une rétrospective à fleur de peau au musée du Luxembourg

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Jusqu’au 12 février prochain, le musée du Luxembourg accueille une exposition rétrospective consacrée à un artiste majeur mais parfois oublié : Henri Fantin-Latour. Autoportraits, portraits de groupe, natures mortes : pour la première fois depuis l’exposition du Grand Palais la carrière de l’artiste est exposée dans son ensemble, dans un ordre chronologique idéal pour entrer au cœur de ses recherches esthétiques. Découverte.
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Henri Fantin-Latour,  Hommage à Delacroix,  1864 © RMN-Grand Palais (Musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski

Il est probablement l’un des grands oubliés de l’Histoire de l’art. Le terme peut paraître un peu fort, mais face au talent, à la polyvalence et à la maîtrise d’Henri Fantin-Latour, difficile de ne pas s’attendre à une certaine renommée. Pourtant on le connait peu, on a peine à remettre un tableau ou même un style, une pratique sur ce nom mystérieux. L’une des principales explications réside peut-être dans sa faculté à se remettre en question, à son éternelle insatisfaction qui l’ont fait toucher à tout, ou du moins à plusieurs choses. Portraits, d’un modèle ou de groupe, natures mortes ou peintures « d’imagination », toutes ces facettes de Henri Fantin-Latour sont réunies à Paris (pour la première fois depuis la grande rétrospective du Grand Palais de 1982) jusqu’au 12 février au musée du Luxembourg. L’exposition intitulée A fleur de peau explore à travers plus de cent vingt œuvres les différents aspects de son travail à travers les années dans un parcours chronologique sous forme d’hommage, de rétrospective et de découverte. Découverte pour ceux qui le connaîtraient mal mais aussi pour les autres… Car il y a de belles surprises !

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Henri Fantin-Latour,  Autoportrait, la tête légèrement baissée,  1861 © National Gallery of Art, Washington

Si l’on parle souvent de « l’œil » pour désigner le talent et la particularité d’un peintre, le terme est particulièrement juste lorsqu’il s’agit d’évoquer Henri Fantin-Latour. Car dès ses premières années, dès les premières salles pour le simple visiteur que nous sommes, dès le choix de ses premiers modèles, personnels, intimes, l’œil du jeune peintre face à la réalité impressionne tant il est saisissant. D’abord ce sont ses sœurs, représentées selon différentes mises en scène puis, rapidement, vient son tour, à lui, viennent les autoportraits. Peut-être avons nous ici affaire à ce que Fantin-Latour a de plus touchant, de personnel, d’intime : si la maîtrise s’affirmera un peu plus tard, la fougue, l’ambition et la délicatesse qui se dégagent de ces œuvres de jeunesse sont exceptionnelles, au point même, peut-être, de ne se retrouver qu’à la fin de sa vie de peintre.

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Henri Fantin-Latour,  Coin de table, 1872 © Rmn- Grand Palais

C’est à partir du milieu des années 1860 que la carrière de Fantin-Latour prend son tournant décisif, notamment grâce à une pratique qu’il réinvente totalement : le portrait de groupe. Ainsi faisons-nous face à ce qui restera probablement le plus célèbre des tableaux de l’artiste : Hommage à Delacroix. Cette oeuvre conservée au musée d’Orsay doit sa célébrité à sa valeur, sa grâce et son originalité comme à ses illustres modèles : autour d’un portrait de Delacroix sont réunis James Whistler, Edouard Manet, Fantin-Latour lui-même et Charles Baudelaire, éternel amoureux du travail d’Eugène Delacroix. Cette scène de groupe est le fruit de l’imagination du peintre, chaque personnage semble être seul, personne ne communique avec personne, les esprits et les psychologies brillent individuellement dans une harmonie de tons sombres et une précision saisissantes. Des portraits de ce genre, Fantin-Latour en réalisa plusieurs, toujours avec la même maîtrise de la réalité et de la psychologie sublimée par la précision des traits : ainsi pouvons-nous croiser Frédéric Bazille (qui lui aussi aura très prochainement sa rétrospective à Paris), Arthur Ribaud, Paul Verlaine ou encore Emile Zola.

Natures mortes et féeries

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Henri Fantin-Latour,  Fleurs d’été et fruits,  1866

A partir de 1873, Henri Fantin-Latour se concentre sur une pratique différente qui, dans son approche, reste pourtant très liée à sa façon de voir et de retranscrire le monde : les natures mortes. Des fleurs, beaucoup, par dizaine, dont Fantin-Latour brosse un véritable portrait : chaque particularité, chaque détail, tout ce qui fait d’une fleur quelque chose d’unique est l’objet d’une recherche intense. Voilà une partie non négligeable de la carrière de Henri Fantin-Latour et, logiquement, de la belle exposition du musée du Luxembourg. Comme c’était le cas pour les portraits de groupe, les natures mortes de l’artiste sont particulières, sensibles, touchantes, précises, au point de convaincre les plus réfractaires effrayés par l’éventuel ennui des sujets.

La dernière partie de l’exposition a de quoi surprendre. Basée sur une citation de l’artiste, lassé du réalisme et des natures mortes (qu’il a pratiquées pendant de longues années), la partie des imaginations est à la fois claire et désordonnée : « Je me fais plaisir ». Variant les sujets, les techniques et les inspirations, Fantin-Latour s’attache plus que jamais à la beauté du corps féminin, dans des mises en scène éblouissantes d’originalité quant à sa propre carrière. Outre ce voyage à travers l’oeuvre de l’artiste, le musée du Luxembourg propose un corpus de photographies lui ayant appartenu (pour des recherches esthétiques notamment) ainsi que des citations et extraits de correspondances particulièrement touchants et significatifs. Une exposition de référence que cet artiste majeur de l’Histoire de l’art méritait bien.

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