Article proposé par Exponaute
On peut l’admettre, l’exposition qui s’est ouverte au Ashmolean Museum d’Oxford le 16 septembre dernier entend bien frapper fort, grâce à un accrochage qui réunit pour la première fois quatre œuvres du maître néerlandais Rembrandt van Rijn, quatre peintures qui faisaient à l’origine partie d’une ensemble de cinq tableaux représentant les cinq sens. Toutes ont été peintes entre 1624 et 1625, alors que l’artiste n’était âgé que d’environ vingt ans.
An van Camp, conservateur du département des arts des pays du nord de l’Europe (fraîchement nommé en 2015) ne cache pas son enthousiasme dans une interview donnée au journal britannique The Guardian : « C’est la première fois que ces peintures vont être présentées ensemble dans une même exposition, c’est vraiment formidable. En tant que conservateur, une première mondiale est un rêve. Même les différents propriétaires des quatre huiles ne les ont encore jamais vues réunies. »
Mais cette « mini » exposition des quatre œuvres du peintre néerlandais n’est en vérité qu’un avant-goût pour le musée d’Oxford. Celui-ci prévoit en effet d’organiser une grande exposition dédiée aux œuvres de jeunesse de Rembrandt à l’horizon 2019–2020. Présenter au public pour la première fois les quatre sens restant sur cinq est donc une mise en bouche pour les visiteurs, une sorte de préambule pour donner envie aux visiteurs de revenir dans quelques années pour découvrir le prochain accrochage d’envergure.
En attendant, l’exposition actuelle joue sur le côté exceptionnel des tableaux. En effet, nous vous en parlions en mars dernier, l’œuvre représentant le sens de l’odorat n’a été retrouvée que tout récemment. L’œuvre de Rembrandt était à l’origine la propriété d’un collectionneur américain qui a décidé de s’en séparer. Lors d’une vente aux enchères (l’œuvre était alors estimée entre 500 et 800 dollars !), la galerie parisienne Talabardon & Gautier acquiert le tableau, et la fait expertiser. Bingo ! C’est bien un Rembrandt ! Depuis, l’œuvre a été cédée à la Leiden Collection, une collection privée de New York qui possédait deux autres « sens » signés de la main du peintre néerlandais : L’ouïe et Le toucher.
Aujourd’hui, plus aucun doute n’est possible, l’œuvre d’art est bien de la main du célèbre Rembrandt, ce qui signifie que la Leiden Collection est désormais l’heureuse propriétaire de trois sens sur cinq. La vue est prêtée par le Musée municipal de Leyde, aux Pays-Bas. Mais à l’heure actuelle, le cinquième et dernier sens, Le goût, demeure introuvable. Mais ces petites œuvres ne se contentent pas d’être de classiques représentations des sens de l’être humain.
Rembrandt, dans des scènes précises et minutieuses (les peintures ne sont pas plus grandes qu’une feuille A4), en profite pour se moquer des mœurs de son temps. Ainsi dans Le toucher se moque-t-il de la médecine de son époque, qui pensait des plus sérieusement que les maux de tête étaient provoqués par une pierre coincée dans le crâne ! D’où l’opération chirurgicale représentée sur le tableau : une lithotomie.
Bien sûr, d’un premier coup d’œil, il est difficile de reconnaître la patte de Rembrandt dans ces œuvres de jeunesse. Mais An van Camp l’assure : pour peu que l’on connaisse bien l’œuvre du peintre néerlandais, il est possible de déceler des signes qui ne trompent pas : les couleurs vives, de larges touches de pinceau, un traitement expérimental de la lumière et cette grande maestria dans la représentation des expressions faciales.
Enfin, en lieu et place du cinquième tableau manquant, Le goût, le Ahsmolean Museum en fait appel aux visiteurs : un cadre vide est exposé aux côtés des quatre peintures. Puis, les visiteurs seront invités à décrire, dessiner, peindre ou digitaliser ce tableau manquant. Les propositions peuvent être soumises à l’institution culturelle via le hashtag #MissingRembrandt et seront ensuite diffusés sur la page officielle du musée.
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