Article proposé par Exponaute
Dès 1790, alors que sont nationalisés les biens du clergé et de la couronne de France, le patrimoine architectural est en danger. Vandalisme, destructions, spoliations : les objets, sculptures, tombeaux et monuments historiques sont régulièrement pris pour cibles. C’est là qu’intervient notre homme, Alexandre Lenoir.
En 1791, Lenoir, artiste puis écrivain, est nommé à la tête du couvent des Petits-Augustins, un endroit qui depuis plusieurs mois est utilisé pour déposer les monuments (comprendre : les objets témoins de la mémoire nationale) récoltés un peu partout et séquestrés à la suppression des églises parisiennes. Quatre ans plus tard, Lenoir ouvre le couvent au public : il deviendra alors pendant vingt ans le Musée des Monuments Français et accueille aujourd’hui les Beaux-arts de Paris.
Passionné, dévoué et courageux, Alexandre Lenoir se bat pour sauvegarder un patrimoine malmené : du Moyen-Age à des artistes contemporains (il est très proche, notamment, de David), il imagine un musée dans lequel s’enchaînent les salles comme s’enchaînent les siècles et un jardin Elysée où se suivent les tombeaux de personnages majeurs de l’Histoire de France.
C’est cette mise en scène si particulière qu’a voulu présenter le Louvre dans la première partie de l’expo : grâce à de nombreuses représentations de l’intérieur du musée, salle par salle, le musée des Monuments Français apparaît sous nos yeux comme à l’époque, avec toute la grâce, la folie et le romantisme qui font encore aujourd’hui sa réputation. Tout y est : la grande salle d’introduction, agrémentée de quelques portraits de Lenoir et son épouse par David, et ses sculptures antiques, médiévales ou contemporaines, les différentes salles (du XIIIème au XVIIème siècle) et le jardin Elysée (dont on apprécie particulièrement la représentation du mausolée d’Abélard et Héloïse).
© RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / René- Gabriel Ojéda
Mais, en plus d’être un fervent défenseur du patrimoine, Alexandre Lenoir est avant tout un visionnaire. Si sa collection ne dépendait pas uniquement de son bon vouloir, ses critères de sélection et ses choix d’installations totalement subjectifs témoignent d’un homme convaincu de ce qu’il voulait présenter.
C’est là l’objet de la seconde partie de l’expo du Louvre : des œuvres présentées à l’époque dans le musées et quelques monuments recomposés, des associations qui mélangent les styles et les siècles et qui, à l’époque, a suscité quelques critiques. Dans un article du « journal des débats » sorti en 1802, Lenoir est critiqué pour l’introduction « sans scrupules, dans la composition de plusieurs tombeaux, des morceaux qui, non seulement leur sont absolument étrangers, mais qui souvent contrastent bizarrement ».
Au Louvre, l’exposition du bicentenaire est donc multiple : c’est à la fois un moment crucial dans la gestion et la présentation d’un patrimoine malmené, la création d’un musée avant-gardiste et innovant et la découverte d’un esprit fin et déterminé qui, après 1816, la restauration et la fermeture de son musée, ne se remettra jamais vraiment de son projet monumental, du projet de sa vie.
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