Article proposé par Exponaute
S’il fallait inviter quelqu’un, c’était bien lui. En marge de son exposition Sublime, les tremblements du monde, le Centre Pompidou-Metz a donné de la place, beaucoup de place, à l’artiste japonais Tadashi Kawamata. Alors que derrière ce Sublime se cache une fascination pour la nature violente et déchaînée, Kawamata s’impose : en plus de contempler, on traverse, on vit, on expérimente. En mars 2011, un séisme se déclare au large des côtes nord-est de l’Île de Honshu, au Japon. Ce tremblement de terre provoquera un tsunami ravageant 600 km de côtes et des dizaines de villes et conduira à la catastrophe nucléaire de Fukushima. Tadashi Kawamata était alors à Paris, loin mais profondément touché.
Dans une forme d’hommage empathique, l’artiste a rassemblé, comme il l’a toujours fait, des planches de bois, des morceaux de chaises, des débris plus signifiants que jamais qui, ensemble, créent une immense vague qui plane, lourde au-dessus des visiteurs. Alors quand il a fallu parler de sublime, l’artiste était tout trouvé. Car le sublime en question est une notion plus fine que ce que l’on pourrait croire : on parle ici d’un plaisir mêlé d’effroi, du calme menaçant de la nature qui se déchaîne, d’une beauté attirante qui, en même temps, refroidit.
Et c’est précisément ce qu’a reproduit Kawamata avec Under the Water. Des Under the Water, il y en a eu plusieurs (notamment à Paris), mais jamais aussi vastes et puissantes que celle de Metz. Célèbre pour son travail du bois, des débris et des morceaux de meubles, l’artiste assemble et créé de nouvelles formes, subtiles et épurées, des cascades, des sanctuaires et différents types de vagues. Au Centre Pompidou-Metz, dans l’entrée, un monument de porte accueille les visiteurs. Mais c’est un peu plus haut que se déploie cet Under the Water aux dimensions pharaoniques (et totalement justifiées).
Dans l’exposition, on contemple les lacs, les océans, les planètes, l’univers, passifs et impuissants devant la beauté de phénomènes qui nous échappent. Sous Under the Water, c’est autre chose, c’est plus que ça, c’est du vécu. L’ambiance tamisée nous apaise, l’oeuvre est comme un organisme, la vague est si précise qu’elle a l’air d’avancer. Et puis on y regarde de plus près. Et on voit la réalité brute : des centaines de débris assemblés par la force naturelle, ces mêmes débris qui témoignent et nourrissent la vague qui, soudain, nous apparaît comme celle qui a ravagé les côtes japonaises il y a quelques années.
Sous la vague, seuls s’échappent quelques rayons de lumière. Et on se laisse porter, on compatit et, comme l’artiste l’a voulu en imaginant son installation, on pense aux victimes de 2011 qui ont littéralement vu ce genre de vagues de débris déferler sur les côtes. Le choc esthétique est rapidement accompagné d’une réelle prise de conscience, par la taille de la vague, par la lumière et par le détail (des morceaux de chaises, de portes et d’objets du quotidien). On déambule, on s’imprègne, on reçoit autant qu’on admire, tout le sublime est là.
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