Article proposé par Exponaute

Au musée Cognacq-Jay, Jean-Baptiste Huet ou l’amour des animaux

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Décidément, les animaux envahissent les musées du Marais ! Après Walton Ford, c’est au tour de Jean-Baptiste Huet. Peintre, dessinateur et graveur prolifique, Huet fut de son vivant une figure majeure de l’art du XVIIIe siècle. Passionné par la nature et plus précisément le monde animal, il réalisa de nombreuses œuvres rendant hommage aux bêtes, qu’elles soient domestiques ou sauvages. Le Musée Cognacq-Jay dédie une belle exposition à un artiste quelque peu oublié de nos jours.
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Jean-Baptiste Huet, Un dogue se jetant sur des oies, 1768–1769 © RMN Grand Palais

C’est la première fois qu’un musée français dédie une rétrospective à Jean-Baptiste Huet, cet illustre pourtant inconnu. En offrant aux regards curieux des visiteurs une sélection de 72 œuvres (peintures, objets décoratifs, dessins, gravures…), Cognacq-Jay entend bien ramener dans la lumière un artiste qui a été salué de son vivant pour son sens du détail et la force saisissante de ses compositions.

Membre de l’Académie Royale de peinture, exposé pendant des décennies au Salon, Huet savait cependant se faire discret, puisqu’il préférait honorer des commandes privées plutôt que de répondre à des demandes publiques. Il suivit relativement peu le goût de son temps, délaissant les sujets historiques (alors fort à la mode au XVIIIe siècle) pour se concentrer sur sa passion de toujours : le monde animal.

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Jean-Baptiste Huet, Trois moutons, une chevre, un âne et reprise de son museau © Collection privée

Peu d’influences de l’art antique dans les œuvres d’Huet donc, mais plutôt un penchant déclaré et assumé pour les écoles hollandaises et italiennes. Lorsque Jean de La Fontaine disait en ouverture de ses Fables : « Je me sers d’animaux pour instruire les hommes », on pourrait trouver une corrélation entre les deux hommes, le peintre choisissant le règne animal pour alarmer les humains sur la sensibilité de ces créatures.

Car là est bien le fil rouge de toutes les représentations du monde animal de Jean-Baptiste Huet. Dans ses sanguines, ses pierres noires, ses huiles sur toile, vous ne croiserez jamais une bête en train de se nourrir, ou simplement d’errer dans son milieu naturel. Le peintre est attiré par la sensibilité des créatures, leur capacité à ressentir la douleur et par les regards pleins de tendresse qu’ils jettent à leur progéniture.

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Jean-Baptiste Huet, Coq, poules, poussins et colombes, 1780 © Musée des Beaux-Arts de Quimper

C’est ainsi que l’on croise de très nombreuses représentations de familles d’animaux. Coq et poule veillant sur leur cohorte de petits poussins, lionne serrant dans ses pattes avant un lionceau joueur, oie et jarre défendant leurs oisons face à un mâtin affamé…

Que les espèces soient domestiques (chiens, chats…), locales (moutons, volaille…) ou exotiques (grands félins), Jean-Baptiste Huet rend compte de leur apparence avec un détail surprenant. On pourrait passer des heures à admirer les détails de la crinière d’un fier lion ou le plumage tout duveteux d’un couple de colombes.

Certains traits sont si fins qu’on se demande bien comment Huet est parvenu à obtenir un tel résultat du bout de son pinceau… Ces belles œuvres sont en fait le reflet d’une observation minutieuse des créatures qu’il reproduit sur ses toiles, une démarche qu’on pourrait rapprocher de celle des naturalistes.

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Jean-Baptiste Huet, Lionne et ses petits, 1801–1802 © Albertina Museum

Il faut prendre le temps d’observer les expressions des bêtes. Car oui, sous le pinceau d’Huet, elles en ont, toutes. Çà, c’est un loup agonisant après avoir été mortellement blessé par un pieu, et qui nous jette un ultime regard avant d’expirer. Là, c’est un chiot qui nous dévisage, avenant, un ruban entre les babines, attendant certainement une caresse.

Chaque créature a sa personnalité propre, et l’on sent chez l’artiste une vraie prise de position au sujet de la condition animale. S’il représente un loup blessé, ce n’est pas pour valoriser le chasseur, mais pour pleurer les derniers instants du canidé. S’il dessine de nombreux petits chiens domestiques, c’est pour porter aux nues leur fidélité sans limite, leur amour inconditionnel de leur maître et leur patience à toute épreuve.

Antispéciste, Huet ? N’allons pas jusqu’à accoler des notions contemporaines à un artiste né il y a un peu moins de trois siècles. Mais ses œuvres sont frappantes de vérité, touchent à notre sensibilité et glorifient la faune et les forces de la nature.

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