Article proposé par Exponaute
Datée entre 1500 et 1510, cette petite huile sur bois (39 × 25 cm) pourra donc très prochainement s’envoler pour Bois-le-Duc, où ouvrira bientôt (à l’occasion des 500 ans de la mort de l’artiste) la plus grande rétrospective jamais organisée sur l’œuvre du maître hollandais, à compter du 13 février prochain, au musée Noordbrabants. L’ajout est certes modeste, mais très important pour mieux comprendre l’art de Jérôme Bosch et son évolution graphique.
Dépeint sur un fond vert, Saint Antoine arbore ses attributs traditionnels de l’iconographie religieuse : un large manteau brodé d’une croix, et un bâton de pèlerin sur lequel il prend appui afin de puiser de l’eau dans une rivière, à l’aide d’une cruche. À ses pieds, des démons s’agitent, tentent de le distraire de son action, et cherchent ainsi de le détourner de la voie de Dieu. Saint Antoine ignore que ces monstres sont envoyés par le seigneur lui-même, qui cherche ainsi à tester sa foi. Mais celui-ci réussira l’épreuve. Tout coïncide avec le style pictural typique de Bosch. Pourquoi alors, une attribution si tardive ? Tout simplement parce qu’au cours du XXe siècle, le panneau a subi de nombreuses retouches et autres repeints, qui ont rendus difficile l’authentification de la main du maître.
Des analyses ont donc été entreprises afin de voir au-delà de ces ajouts tardifs et peu scrupuleux, et de définir si oui ou non, Bosch est bien à l’origine de cette peinture. Et la réponse est oui, le tableau présentant de frappantes analogies avec une autre production du maître : le Triptyque des Ermites, conservé à la Gallerie dell’Accademia de Venise, en Italie. Grâce à la technologie infrarouge, des dessins sous-jacents ont été révélés, entérinant l’attribution de ce Saint Antoine. Des touches aqueuses, tâtonnantes, épaisses, caractérisent la technique de Bosch. Plus de doutes possibles.
Ressemblances avec le Triptyque des Ermites, d’accord, mais également avec le panneau central du Jugement Dernier conservé à Bruges ! La figure de Saint Antoine genou fléchi, et les démons tournant autour du personnage principal sont caractéristiques du registre de Jérôme Bosch. On retrouve ses habituels monstres coiffés d’un entonnoir (pour la petite anecdote, c’est à l’artiste qu’on doit l’image passée dans l’imaginaire populaire du fou portant entonnoir sur la tête en guise de couvre-chef), les créatures aux becs proéminents, les crapauds et autres chimères arborant des armures médiévales. Autant de détails qui se croisent dans presque chacun des tableaux du maître de Bois-le-Duc.
Comme beaucoup de panneaux qui nous sont parvenus de Bosch, La tentation de Saint Antoine appartenait à l’origine à une œuvre beaucoup plus grande, probablement un diptyque ou un triptyque. Celui-ci a été sciée à une date inconnues, la séparant des autres réalisations. Aujourd’hui, les experts pensent que l’huile sur chêne que nous voyons devait composer le panneau central, où le saint chrétien était probablement plongé au cœur d’un univers hostile, mais tout cela n’est que suppositions, en absence des autres panneaux du triptyque.
C’est d’ailleurs cette disparition des autres panneaux qui a également contribué aux hésitations des historiens de l’art à définitivement attribuer la peinture à Bosch, optant à l’époque pour une prudente parenté à un membre de son atelier.
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