Article proposé par Exponaute
C’est un projet débuté il y a 23 ans, et qui pourrait ne jamais voir le jour. Alors qu’en janvier 2015, la justice permettait à Christo d’installer l’œuvre qu’il avait imaginée au-dessus de l’Arkansas River, c’est finalement en appel que se décidera son avenir.
Initiée en 1992 par Christo et Jeanne-Claude (duo d’artistes communément appelé Christo), l’installation monumentale (évidemment) est composée d’une immense toile étendue au-dessus de la rivière Arkansas sur une distance de près de 70 kilomètres. Christo désire l’installer en été, pour profiter des milliers de touristes venus faire du rafting sur la rivière (raison pour laquelle l’endroit a été choisi). Mais, quoi qu’en dise la justice, ce ne sera pas pour l’été 2016 : deux ans seront nécessaire à l’installation de l’œuvre qui ne devrait rester sur place que pour une durée de deux semaines.
Autant dire que le projet suscite, depuis ses débuts et encore aujourd’hui, des réactions hostiles et des problèmes juridiques auxquels Christo est fréquemment confronté : trop cher, pas écolo, encombrante, illégal, Over the River connaîtra sans doute une forte opposition jusqu’au jour de sa désinstallation.
Si le projet est bien accueilli par les acteurs culturels (qui perçoivent la superbe opportunité touristique qu’il représente), certains organismes locaux restent solidement opposés à l’arrivée d’une toile de 68 kilomètres au-dessus de leur rivière. Alors que l’installation prévoit des tissus suspendus qui changeraient les couleurs et l’atmosphère de la rivière au fil de la lumière du soleil pour conduire, en quelques sortes, à une nouvelle contemplation de la nature, on reproche à Christo la consommation pharaonique d’énergie et de moyens pour mettre le projet à bien et pour faire en sorte qu’un grand nombre de visiteurs puisse y avoir accès (voiture, bus, fleuve, canoë…).
De son côté, l’artiste est, comme toujours, patient : pour emballer le Reichstag, il avait fallu attendre près d’un quart de siècle (premières esquisses en 1971, réalisation en 1995), pour le Pont-Neuf, le duo d’artistes s’était livré à une bataille juridique d’une dizaine d’années avant d’avoir finalement une autorisation.
En marge de ces succès ayant nécessité des années de planification, plus de trente projets de Christo en sont restés à ce stade. Parmi ces projets un peu fou (le Reichstag l’était aussi malgré tout), celui d’emballer tout un parc à Tokyo, des grattes-ciels ou encore le MoMA à New York, et plusieurs ponts dont le Pont Alexandre III à Paris.
Christo ne craint donc ni l’attente, ni la déception. A la mort de son épouse en 2009, l’artiste a décidé de tenir une promesse mutuelle : mener à bien les projets en cours. Mais cette fois-ci, en plus des autorités locales qu’il a fallu convaincre, les opposants au projets se sont montrés particulièrement virulents. Comme le rapporte le Denver Post dans ce qu’il appelle « l’opération de torture » des habitants du Colorado envers l’artiste, Christo a été la cible de toutes sortes d’attaques, des plus basses (insultes, moqueries, critiques de son travail) aux plus onéreuses (7 millions de dollars de frais d’expertises de terrain et de procédures en tous genres).
Alors qu’une installation est dores et déjà prévue pour cet été en Italie (des sortes de ponts sur lesquels les visiteurs pourront passer) et qu’une autre, permanente et monumentale (plus haute que la pyramide de Khéops) composée de barils de pétrole aux Emirats Arabes Unis est laissée en stand-by, Over the River est la priorité absolue de l’artiste. Et devrait être le dénouement, heureux ou non, d’une longue histoire entre Christo et la justice à travers le monde.
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