Article proposé par Exponaute

C’est quoi un MC ? La genèse du hip-hop en un lexique

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Un mur de getthos blasters repeints à la bombe, une carte du Bronx et des baffles qui crachent le Rapper’s Delight de The Sugarhill Gang, premier tube de rap vendu à 15 millions d’exemplaires en 1979. Jusqu’au 26 juillet, l’exposition « Hip-Hop » à l’Institut du monde arabe nous raconte l’histoire du mouvement, sneakers vintage, morceaux fétiches et œuvres d’art contemporain à l’appui. L’occasion idéale de se familiariser (si ce n’est pas déjà fait) avec quelques termes propres au hip-hop.

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© NYC Breakers / Photo Laure Narlian

Le Hip

Le hip a plusieurs étymologies : le mot « branché »  (« to be hip » signifie en anglais « être à la mode ») et l’argot « débrouillardise » .

Le Hop

Onomatopée du saut, le hop évoque la danse (et son importance dans le mouvement) et par extension sémantique l’idée d’une avancée. Une évolution grâce à l’intelligence (le hip) dans le sens de la créativité.

Block Party

La Block Party, c’est le creuset du hip-hop, là où ont été fondus les ingrédients du mouvement. Une fête de quartier organisée sur un bout de trottoir du Bronx qui contaminera courant seventies Harlem puis le Queens et Brooklyn. Sorte de version améliorée des Sound Systems jamaïcains. On installe quelques barrières (pour délimiter l’espace), invite les voisins (qui payent une petite participation) et fait venir un DJ et une « disco mobile ». La première block party de l’histoire du hip-hop se tient au 1520 Sedgwick Avenue, dans le Bronx. Clive (Campbell), un jeune homme de 16 ans d’origine jamaïcaine, vient passer un peu de funk pour l’anniversaire de sa sœur. On est en 1973. Son pseudo : DJ Kool Herc, bientôt célèbre, restera gravé dans l’asphalte comme l’inventeur du hip-hop.

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Peace, love, unity…

… and having fun ! C’est la devise du hip-hop première génération, et plus particulièrement de la Zulu Nation, une organisation pacifiste née en 1973 dans le Bronx. Son fondateur, le DJ Afrika Bambaataa, est avec DJ Kool Herc l’un des pères du hip-hop. Son combat : la lutte contre la violence des gangs – son cousin Soulki meurt sous les balles lors d’un affrontement avec la police – et la « recherche des moyens positifs pour survivre dans la société ». Son arme : la danse, le graff, le DJing et le MCing, soit toutes les facettes du hip-hop balbutiant.

Breakbeat

Sans breakbeat pas de hip-hop. Ce « rythme cassé » (binaire et syncopé) naît avec les premières block parties. On attribue traditionnellement sa création à Kool Herc qui l’emprunte au funk et à ses breaks de batterie. Le DJ a l’idée d’enchaîner ces interludes de percussion au moyen de deux platines jumelées. Il est à l’origine du sample et du turntablism.

Breakers

On les appelle breakers, breakdancers, mais aussi b-boys ou b-girls. Peu importe, ce sont tous les adeptes de la breakdance ; ceux qui enchaînent des figures dans les premières block parties du South Bronx sur le « break » du DJ — passage instrumental où seules percussions et basses subsistent. Kool Herc a remarqué que plus les breaks duraient et plus « ça bougeait ». Il décide de les jouer en boucle. Breakbeat et breakdance sont donc historiquement liés comme les doigts de la main, d’où leur proximité étymologique. Le breaker s’autonomisera ensuite du DJ grâce au gettho-blaster. Deux crews sont restées dans la légende : les New York City Breakers et le Rock Steady Crew.

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Crew

Groupe de hip-hop (musique ou danse) appelé également « posse ».

Gettho-blasters

Terme anglais pour désigner un radiocassette (et oui, ça sonne nettement moins bien).  On reconnaît les modèles historiques des années 1970/80 par leur forme rectangulaire et leur taille démesurée. Star de cette époque, pour ses leds clignotants et sa puissance sonore : le JVC RC-550, surnommé « El Diablo ». Le gettho-blaster (ou boombox) accompagne les breakers avec la vocation de faire (littéralement) « exploser » le gettho.

Freezes

Nom donné aux poses statiques du breaker, qui marquent les temps de la musique. En général, le danseur commence par le « toprock » (des pas de préparation exécutés debout) et enchaîne sur les figures au sol (« downrock »), « spins » (rotations sur la tête ou le dos) ou « power moves » (postures acrobatiques).

MC

Pour Master of Ceremony ou Microphone Controller. Aux premières heures du hip-hop, c’est un peu le chauffeur de salle ; celui qui prépare l’arrivée du DJ à coup de rimes ou d’onomatopées bien senties. Proto-rappeur, le MC s’en différencie par la dimension performative de son show, même si les termes tendent à se confondre aujourd’hui. Chaque MC a son flow (style d’élocution et de débit).

Toaster

L’ancêtre du rappeur. Littéralement : « celui qui fait sauter les mots ». Il pratique le toasting, une technique vocale utilisée par les griots africains puis par les rastas jamaïcains et qui inspire directement le MCing.

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IMA, Paris © Exponaute (2015)

Battle

Passée dans le langage courant depuis quelques années, la battle ou « bataille » est une compétition entre deux breakers (danse) ou deux rappeurs. Il s’agit d’une version contemporaine des dozens, ces joutes verbales rituelles propres aux communautés afro-américaines. Certaines battles sont rentrées dans la légende comme celle opposant les Cold Crush Brothers aux Fantastic Romantique Five, en juillet 1981 au Word Harlem.

Scratch

Mouvement de la main d’avant en arrière (dragging) qui consiste à ralentir ou accélérer la vitesse d’un vinyle, et produire une modulation sonore. Si le procédé apparaît comme le hip-hop dans le Bronx, on ne le doit pas à DJ Kool Herc mais à Grand Wizard Theodore. Ce dernier est encore un adolescent quand sa mère lui demande de baisser le son de sa platine. Theodore s’exécute et la stoppe avec la main au lieu de soulever le bras de lecture. La date de naissance du scratch est fixée, elle, à 1977, quand Theodore le pratique pour la première fois en public. Son aîné (et mentor) le DJ Grandmaster Flash en revendique cependant l’invention depuis quelques années. Baby Scratch, Crabe… autant de techniques qui vous seront expliquées par l’intermédiaire d’une vidéo dans l’exposition « Hip-Hop, du Bronx aux rues arabes ».

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Sidney

Il reste une idole pour les téléphages (et hiphop’philes) des années 1980. Lunettes à fentes et survet’ rouge, Sidney est l’animateur de l’émission culte HIPHOP (prononcée à la française, lettre après lettre), diffusée pour la première fois sur TF1 en 1984. Avec sa fameuse « leçon de danse », Sidney est le grand vulgarisateur du mouvement dans l’Hexagone. On y croise The Sugarhill Gang, le très jeune Joey Star en compétiteur de breakdance et le graffeur Futura 2000.

Dee Nasty

Dee Nasty est un peu l’Afrika Bambaataa français, représentant de la « Zulu Nation » hexagonale. Il importe le hip-hop en France après un séjour aux Etats-Unis en 1979, et signe le premier album de rap français : Paname City Rappin’. Abandonnant le MCing pour le DJing, Dee Nasty se fait connaître par ses battles de hip-hop, organisées dès 1985 dans les friches urbaines du quartier La Chapelle, à Paris. Quelques années plus tard, le groupe I Am fait ses débuts à la Maison hantée sur le cours Julien à Marseille et Public Enemy se produit au Globo, à Paris. Deux scènes pionnières du hip-hop en France.

Dee nasty-Paname City Rappin’ par R-87

Le graff

Le graff (du Grec graphein qui signifie écrire) est un dessin réalisé sur un support non conventionnel, parfois difficilement inaccessible (les wagons d’un train par exemple) et bien souvent illégal. Il précède la culture hip-hop (il émerge à Philadelphie) mais se lie étroitement à son développement dans le New York des années 1970. Le graffeur est à l’origine un writer (qui utilise des lettres). Il signe (tague) avec son blaze (pseudonyme), peint à l’aérosol (bombing) des lettrages sommaires en volume (throw-up), avec ou sans remplissage (flop), ou des réalisations plus élaborées (fresque). Basquiat choisit les couloirs du métro new-yorkais ; JonOne les terrains vagues de Stalingrad.

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