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La Grande Vague d’Hokusai, une image symbole

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Publié le , mis à jour le
Le somptueux musée Guimet présente jusqu’au 7 janvier une exceptionnelle exposition des estampes et dessins d’Hokusai – ou plutôt deux expositions, puisqu’une rotation des œuvres, très fragiles, a eu lieu le 10 décembre. L’occasion de voir ou revoir l’un des chefs-d’œuvres du maître japonais, La Grande Vague de Kanagawa. Analyse.

Kanagawa oki namiura (Sous la grande vague au large de la côte à Kanagawa), signature : Hokusai aratame Iitsu hitsu, éditeur : Nishimuraya Yohachi (Eijudô), Paris, musée Guimet, legs Raymond Koechlin, 1932/Eo 3285 © Thierry Ollivier/RMN.

L’artiste

Katsushika Hokusai (1760–1849) est, avec Hiroshige (né en 1797), le grand maître de l’ukiyo-e. Se surnommant lui-même Gakyōjin, le « Fou de dessin », c’est un artiste passionné. Inventeur du terme manga (qui désigne l’ensemble de ses carnets de croquis, et par extension son « dessin spontané »), il a notamment pendant sa longue existence produit des estampes, écrit des contes, peint au balai et à l’encre une œuvre de 240 m², et s’était donné pour tâche de réaliser un dessin par jour.

L’ukiyo-e

Cette estampe fait partie des Trente-six vues du mont Fuji, série de quarante-six planches publiée en 1831–1833. On y voit l’homme aux prises avec les éléments : l’ukiyo-e, ou « image du monde flottant » reprend la tradition japonaise du bouddhisme, dans lequel transparaît le pessimisme d’un monde impermanent, où l’homme est fragile face à une nature grandiose et souveraine. Techniquement, l’impression est réalisée à partir de plusieurs planches de bois gravé, une pour chaque couleur, notamment un intense bleu de Prusse.

Détail.

Le sujet

Cette série montre des « vues célèbres » (meisho-e) de paysage au format horizontal (emprunté à l’art occidental). On voit au fond, derrière l’horizon, le mont Fuji, dont le sommet est visible à des centaines de kilomètres de distance. C’est pour les Japonais un endroit symbolique, lieu de retraite bouddhiste et de pèlerinage shintoïste. La scène représente une tempête dans la baie de Tokyo, au large de Kanagawa, dans laquelle sont piégés trois barges de pêcheurs. En fonction de leur taille, la hauteur estimée de la vague est de quatorze à seize mètres de haut.

Le style

Au mont Fuji répond en écho formel une vague plus petite au premier plan. De l’infiniment grand à l’infiniment petit, la vague évoque un mouvement continu et perpétuel, dont la géométrie suit le principe de la fractale. L’extrémité de la lame en écume acérée rappelle la main crochue d’un monstre invisible. Le bleu et le blanc sont clairement dissociés, les formes marquées d’un cerne noir caractéristique du style d’Hokusai, et l’équilibre est parfait entre les formes, les pleins et les vides – on a parlé de la matérialisation, dans cette nature animiste et harmonieuse, du principe du yin et du yang, la complémentarité parfaite.

Détail.

Influence

Si Hokusai s’inspire de la perspective occidentale, l’influence de l’artiste sur les peintres et graveurs occidentaux est plus grande encore. Van Gogh, Pissarro, Degas, Renoir, Monet possèdent des exemplaires des Trente-six vues du mont Fuji. On retrouve chez les impressionnistes le goût de la nature et de l’impermanence des choses (notamment dans les Nymphéas de Monet), et chez les Nabis et les post-impressionnistes (Bonnard, Vallotton, Vuillard, Ranson…) la manière de cerner fortement les formes et l’utilisation des couleurs vives. Par ailleurs, Claude Debussy, compositeur de La Mer, possédait un exemplaire de La Vague, qu’il utilisa pour illustrer la partition publiée en 1905. C’est aussi cette estampe qui inspire le logo de la marque de vêtements Quiksilver, et l’une des œuvres d’art les plus reproduites au monde.

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