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Henri Labrouste, l’architecture de l’ombre à la lumière

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Publié le , mis à jour le
Architecte majeur du XIXe siècle, Henri Labrouste (1801–1875) a révolutionné le concept même de construction. Bien au-delà de la structure et de son aspect technique, il étudiait le bâtiment dans son intégralité, privilégiant le confort et évaluant avec minutie son contexte social, historique et géographique, pour offrir aux usagers les meilleures conditions d’appropriation. Ses théories révolutionnaires et son influence sur l’architecture contemporaine sont au cœur de l’exposition proposée à la Cité de l’architecture et du patrimoine, en co-production avec le MoMA de New York. 

Salle de lecture de la bibliothèque Sainte-Geneviève © DR.

De son travail, nous pouvons retenir deux chefs-d’œuvre mondialement connus, la bibliothèque Sainte-Geneviève et la Bibliothèque nationale – inspirée de solutions adoptées à la Bibliothèque du British Museum qu’Henri Labrouste visite en 1857. La lumière, clé de voûte d’un processus de réflexion ancré dans le courant romantique, participe pleinement à la beauté de ces vastes volumes où nous retrouvons les principales caractéristiques de sa prose architecturale.

Aventures esthétiques et sensorielles, ces deux bâtiments sont les premiers à se doter d’un éclairage au gaz et à bénéficier de grandes ouvertures, traits d’union entre intérieur et extérieur, mais surtout véritables puits de lumière, dont la construction est rendue possible grâce à l’utilisation de nouveaux matériaux (fer et fonte). Alliant l’utile à l’agréable, Labrouste rationalise l’espace en séparant, par exemple, l’espace de consultation et de conservation des ouvrages. Il se place à l’exact opposé de la « bibliothèque-palais », en accordant une importance à la fonction et non à l’apparence du bâtiment. Profondément ancré dans les valeurs sociales, l’architecte place l’homme au cœur de ses préoccupations architecturales.

 Bibliothèque nationale, vue d’ensemble de la salle de lecture © Georges Fessy.

Les deux salles de lecture de Saint-Geneviève et de la BN font partie des créations spatiales les plus extraordinaires du XIXe siècle. Malgré une impression monumentale, qui peut donner une sensation de petitesse, Henri Labrouste privilégie l’humanité en offrant une certaine intimité. La lumière et la structure sont les clés de compréhension de ses propositions. Sigfried Giedion, historien et critique, compare d’ailleurs la bibliothèque Sainte-Geneviève « aux rouages d’une montre dans son boitier. » Il n’y a en effet aucun élément de construction, chez Henri Labrouste, qui ne corresponde à une nécessité.

Il met également un point d’honneur à l’ornementation. Pour lui, « l’architecture est la construction ornée ». Avant-gardiste, il utilise les murs, le plus souvent les façades, comme de grandes pages d’écriture, qu’il recouvre de signes et d’inscriptions, ouvrant ainsi la voix des murs médias. La bibliothèque-Sainte Geneviève est recouverte de 810 noms d’hommes illustres, véritable catalogue d’auteurs, qui souligne la fonction de ce lieu de connaissance et de savoir.

L’extérieur de la bibliothèque Sainte-Geneviève, couverte de noms d’hommes illustres © Serge Jodra, 2009.

Investi dans l’architecture publique, Labrouste a, de par sa reconnaissance et sa crédibilité auprès de ses pairs, occupé plusieurs positions officielles au sein d’institutions de prestige comme la Société des monuments historiques ou la Société centrale des architectes français. Une influence incontestée qui s’opère en France auprès de ses élèves (citons par exemple Juste Lisch architecte de la gare St Lazare) et par delà nos frontières : Gustaf Dahl et la Bibliothèque royale de Suède, Francisco Marcelino de Sousa Aguiar et la Bibliothèque nationale du Brésil, jusqu’aux Etats-Unis avec Charles Coolidge Haight et l’Université de Columbia ou encore James Lennox et la Lennox library de New York.

Les Américains, fascinés par le travail d’Henri Labrouste, ont entrepris en 1975 la réalisation d’une exposition The Architecture of the Ecole des Beaux-Arts, très controversée à l’époque, présentée au MoMA de New York. Elle présentait à la jeune génération une nouvelle interprétation de l’œuvre de Labrouste en mettant l’accent sur la richesses symbolique de son travail. Une expérience que le MoMA a souhaité renouveler en collaborant avec la Cité de l’architecture et du patrimoine, et en organisant sa propre exposition, Henri Labrouste : Structure Brought to Light, au printemps 2013.

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